Pierre Dedieu et Jean Texereau, deux collègues de l’Observatoire de Paris, retraités depuis plusieurs années, sont décédés, l’un en août 2013, l’autre en février 2014. Pour une large part de leur carrière, l’un et l’autre ont œuvré, pour l’astronomie française en ayant appartenu au Laboratoire d’optique, créé au milieu des années vingt.
Ce laboratoire trouve son origine dans l’intérêt que deux mécènes, M. et Mme Dina, ont pour de grands télescopes aux fins de recherches en astrophysique. Leur souhait devait se concrétiser, avec la contribution de G.W. Ritchey (1864-1945), opticien reconnu des Etats-Unis arrivé en France en 1924, à l’origine des télescopes du type Ritchey-Chrétien en 1926/27, issu de sa coopération avec le français H. Chrétien (1879-1956). Comme l’écrit le directeur de l’époque, Ernest Esclangon (1876-1954), dès 1924 Le travail d’optique est commencé dans les locaux mêmes de l’Observatoire… Ritchey est installé dans la salle de la Méridienne de l’Observatoire, laquelle tient son nom de la trace au sol du méridien de référence, déterminé en juin 1667, et constituant un instrument d’observation du Soleil.
A cette époque, un jeune physicien, André Danjon (1890-1967) - astronome à l’observatoire de Strasbourg - est chargé, sous l’autorité du général Ferrier (1868-1932), intéressé par la télégraphie sans fil et par l’astronomie, d’étudier un projet d’observatoire pour l’astrophysique, en parallèle à celui du Pic-du-Midi. Pour mener à bien le projet - on connaît la suite - il faut créer un véritable laboratoire d’optique. Ce sera fait avec la venue, en 1925 depuis l’observatoire de Strasbourg, d’un jeune ingénieur chimiste, André Couder (1897-1979) passionné d’astronomie et de … miroirs.
Au départ de Ritchey, en juillet 1926, Couder reçoit la charge de diriger le laboratoire d’optique. M. Dina meurt en 1928 ; sous le nom de Mme Dina-Shillito (de son nom de jeune fille) son épouse poursuit la tâche. Devant les difficultés, et alors qu’un programme de travail a été établi pour les instruments de l’astrophysique, le laboratoire est inscrit au budget de la France, comme service de l’Observatoire de Paris. Un bureau est créé (bois et carton), pour le chef de service, dans la partie Nord de la salle, dont la fenêtre se trouve à l’Ouest.
D’autres membres du personnel, successivement recrutés, sont installés dans le laboratoire. De hautes vitrines, contenant des instruments, et remontant peut-être à Cassini IV (1748-1845), déterminent des espaces entre les piliers servant à entreposer du matériel. Un bureau est aménagé en hauteur, accessible par un escalier, sa partie basse constituant un atelier de menuiserie. La machine à polir les miroirs est installée, dans la partie centrale, côté Sud de la salle. Le gigantisme atteignant les miroirs, celui de 1.93 m pour l’Observatoire de Haute-Provence sera le dernier à pouvoir y être achevé.
Dès lors, la salle de la Méridienne peut voir sa destinée modifiée de nouveau ; elle verra se démonter ses structures, « disparaître » des instruments historiques qui se trouvaient dans ses vitrines et de grosses poutres parties durant un week-end, une vitrine au verre brisé pour la traverser… En 1983 elle fait l’objet d’une restauration importante, prenant alors le nom de Salle Cassini. Seront conservés les deux grands polissoirs, témoins de ce que fût le Laboratoire d’optique pendant plus d’un demi-siècle. Il demeure aussi, dans les collections patrimoniales de l’Observatoire de Paris, un instrument entièrement construit et mis au point à l’Observatoire, parties mécaniques et parties optiques ; il s’agit du premier astrolabe de Danjon d’où sa référence astrolabe 00, s’agissant d’un prototype.
Suzanne Débarbat