La tour solaire de Meudon
Les instruments solaires à haute résolution spatiale sont traditionnellement installés au sommet d’une tour de plusieurs dizaines de mètres pour être au dessus des couches les plus turbulentes de notre atmosphère.
La tour solaire de Meudon a été érigée sur le site de l’observatoire à partir de 1963 et est entrée en service en 1969. Le bâtiment de 35 m de hauteur abrite un télescope vertical coudé d’un diamètre de 60 cm et d’une distance focale de 45 m. Sur la terrasse, un jeu de deux grands miroirs plans, appelé cœlostat, renvoie la lumière du Soleil vers le miroir primaire du télescope qui se trouve dans la partie basse. Le faisceau est ensuite replié pour former une image du Soleil de 42 cm au foyer du télescope.
Cœlostat et spectrographe
A cet endroit, un grand spectrographe de 14 m de long permet de disperser la lumière avec une résolution de 300000. La tour solaire de Meudon a pendant très longtemps été un instrument de référence pour mesurer les vitesses des structures chromosphériques du Soleil grâce au dispositif à double passage soustractif mis en place en 1973.
La tour solaire est toujours utilisée aujourd’hui pour des observations scientifiques mais elle est aussi un instrument remarquable pour l’enseignement méthodologique en physique solaire. Elle est également un collecteur de choix pour des développements instrumentaux et des observations régulières destinées au suivi de l’activité magnétique du Soleil dans le cadre de la météo de l’espace qui vise à nous protéger des effets des éruptions solaires.
Le château de Meudon
L’actuel château de Meudon est appelé « château Neuf » par opposition au « château Vieux » qui a disparu après un incendie en 1795 et une démolition définitive en 1806.
Le château Neuf a une histoire mouvementée. Son enfance commence à l’état d’un petit palais d’été dessiné par Le Primatice (1504-1570), artiste de Bologne : un pavillon surplombant une grotte artificielle somptueusement décorée, agrémentée de nombreux jets d’eau.
Meudon étant devenu résidence royale en 1695 à l’usage du Grand Dauphin, la grotte est remplacée par un nouveau château ce qui permet de multiplier les appartements. Jules Hardouin-Mansart (1646-1708) réalise là une de ses dernières œuvres.
De la grotte d’agrément au château Neuf
Après que le château Vieux, affecté par le comité de Salut Public à des travaux d’ordres militaires, ait été détruit lors d’expériences d’artillerie malheureuses, le château Neuf devient la résidence du Roi de Rome.
Il est encore résidence impériale sous Napoléon III à la veille de la guerre de 1870.
Avec l’encerclement de Paris et le retrait de la garde nationale de Meudon sur la capitale, le 2e corps bavarois établit ses cantonnements sur les hauteurs de Meudon. La terrasse, avec son point de vue privilégié, est transformée en batterie fortifiée. Le parc est complètement bouleversé, les arbres abattus. Les habitants de Meudon seront expulsés et envoyés à Versailles.
Duels d’artillerie
Les duels d’artillerie entre les bavarois et les forts d’Issy et Vanves épargneront le château. Mais deux jours après l’armistice un incendie s’y déclare. Le feu y dure trois journées entières. Les artilleurs de la Commune y enverront par la suite quelques projectiles.
La paix revenue et les murs du château ayant assez bien résisté, des projets de rénovation sont avancés mais rien n’aboutit. Le parc devient le cantonnement de la 3e division d’infanterie du 2e corps et les ruines sont pillées et totalement délaissées.
Ce qui reste du château Neuf sera sauvé par son adaptation pour recevoir une immense coupole abritant une lunette astronomique monumentale. Jules Janssen a en effet installé son observatoire d’astrophysique dans une partie du parc dès 1876. La restructuration du bâtiment est confiée à l’architecte Constant Moyeux. La coupole elle-même sera conçue par Janssen et les établissements Cail. Les travaux s’étalent entre 1880 et 1890. Le 15 décembre 1893 a lieu la première observation avec la grande lunette.
Le parc de l’Observatoire à Meudon
Lorsque Servien, surintendant des finances, baron de Meudon, achète le château situé sur les hauteurs de Meudon en 1655, il n’y a pas de parc. Il va dépenser sa fortune à acheter des terrains, créer la grande terrasse soutenue par le superbe mur que nous voyons toujours, percer des allées, creuser des mares, jusqu’à sa mort quatre ans plus tard.
Jardins à la française
Louvois qui rachète le domaine en 1679 fait appel aux architectes, jardiniers, fontainiers… qui ont travaillé à Versailles, en particulier à Le Nôtre à qui il demande d’aménager les jardins, les bassins et tout un réseau hydraulique destiné à la création de jeux d’eau. C’est l’apogée des jardins à la française.
Séduit par la merveille que représentent ces jardins, la grande perspective, les effets de dénivelés et la vue sur Paris, Louis XIV rachète le domaine pour son fils en 1695. Il y fera planter des dizaines de milliers de fleurs et 8000 marronniers. La forêt, traversée de larges allées pour le passage des carrosses, est un lieu de promenade et de chasse pour la Cour.
Chasses royales
Après la mort de Louis XIV, le domaine royal va progressivement tomber à l’abandon. Il sera utilisé pour la chasse par Louis XV et Louis XVI. Ce dernier vend les jardins bas aux paysans. Pour séparer le parc d’agrément des lieux de chasse, il fait construire un mur, toujours en place, tout en détruisant réservoirs et bassins.
Après 1800 le domaine est démantelé. Napoléon rachète une partie des terres et fait arracher bordures en buis et vieilles charmilles pour faire défiler ses troupes sur la grande terrasse.
Une partie du domaine est donnée à l’astronome Janssen en 1876 pour y créer un Observatoire. En 1913 le domaine de Meudon est classé au titre des monuments historiques et inscrit au titre des sites en 1930. Cette protection assure une préservation des monuments et des espaces. Malgré les dégâts des tempêtes de 1990 et 1999, la forêt a la particularité de présenter un nombre important de très gros arbres, des essences variées, et abrite une population importante d’oiseaux et d’insectes protégés.
Monuments historique et milieux protégés
A l’initiative du Ministère en charge de l’environnement, du fait de la présence de milieux protégés par une directive européenne (pelouses sablo-calcaires), d’oiseaux, d’insectes et de plantes rares, les « boisements et prairies de l’Observatoire de Meudon » ont été reconnus en 2009 comme une Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique.
La direction de l’Observatoire s’efforce par des méthodes de gestion appropriées de préserver au mieux ce patrimoine exceptionnel.
Le spectrohéliographe de Meudon
Au lendemain de l’éclipse de Soleil du 18 août 1868, Jules Janssen a l’idée d’observer de façon isolée la raie Hα de l’hydrogène (alors appelée la raie C). Observer cette partie isolée du spectre lumineux permet alors de voir les protubérances dans la chromosphère du Soleil même en dehors d’une éclipse.
En 1889, Henri Deslandres entre à l’Observatoire de Paris pour y développer la spectroscopie. A partir des idées de Jules Janssen, il construit en 1892 un instrument capable d’enregistrer photographiquement des images de la chromosphère dans son entier, mais isolées dans quelques raies particulières du spectre. Il vient d’inventer le spectrohéliographe – indépendamment de la même invention par l’américain George Ellery Hale.
En 1897, Deslandres s’installe à l’observatoire de Meudon dont il prendra la direction à la mort de Janssen en 1907. Il continue ses travaux sur l’imagerie de la chromosphère et fait construire le bâtiment actuel du spectrohéliographe qui entre en service en 1909.
Un cœlostat à deux miroirs plans renvoie la lumière du Soleil vers l’objectif qui est placé dans une ouverture du mur au sud du bâtiment. Cet objectif de 25cm forme une image sur la fente d’entrée du spectrographe.
Une translation de l’objectif permet à l’image solaire de défiler devant la fente d’entrée. De manière synchrone, une plaque photographique coulissait devant une fente placée devant la raie du spectre. Le résultat était une image du Soleil dans la longueur d’onde sélectionnée.
Depuis 2003, la caméra CCD n’enregistre que le signal d’une rangée de pixels située le long de la raie. La succession d’enregistrements de la caméra est ensuite traitée par informatique pour reconstituer l’image monochromatique de la chromosphère.
Les images sont réalisées dans la raie Hα pour montrer les filaments et les protubérances, mais aussi dans la raie K du calcium à 393.3nm pour faire ressortir les plages faculaires. Un autre cliché, dans l’aile de la raie du Calcium montre les taches solaires et les facules les plus brillantes.
Débutant en 1909, la collection des spectrohéliogrammes de Meudon est la plus importante au monde. L’observation systématique du soleil est une tâche de service de l’Observatoire de Paris.
Le télescope de 1 mètre
L’observatoire de Meudon est né des idées novatrices de Jules Janssen. Celui-ci voulait créer un établissement dédié à l’étude physique des astres en utilisant les techniques nouvelles qui étaient la photographie et la spectroscopie. Cet observatoire s’est ainsi vu doté, en plus de la grande lunette, d’un télescope photographique de un mètre de diamètre.
Dédié à la photographie des objets faibles
Ce télescope révolutionnaire avait une distance focale (distance entre le miroir principal et l’image) de seulement trois mètres. Il était particulièrement lumineux et dédié à la photographie des objets faibles ; nébuleuses, amas d’étoiles et comètes. Sa grande originalité était d’être complètement démontable et transportable en mission, mais il ne l’aura finalement jamais été.
A l’avant du tube une solide poutre mobile supportait la plaque photographique alors qu’un petit prisme renvoyait une partie du faisceau vers un oculaire pour assurer le guidage pendant la pose. Le télescope a vu la lumière pour la première fois en 1891.
Le tube peint en vert sombre, la grande échelle de bois et les nombreux éléments en bois vernis de la coupole conféraient à cet endroit une ambiance feutrée. La coupole, construite par les établissements Cail était munie d’un système de quatre volets pour créer une large ouverture vers le ciel. Ce dispositif a ensuite été remplacé par deux trappes à ouverture latérale. Un appentis en bois abritait un laboratoire photographique, des cabinets de travail ainsi que des chambres pour les observateurs.
Le télescope a donné de très nombreuses photographies de nébuleuses à la fin du dix-neuvième siècle puis il a été largement utilisé pour des travaux de spectroscopie (analyse de la lumière par sa décomposition), notamment sur les comètes.
A partir de 1930, Bernard Lyot observait la polarisation de la lumière sur les surfaces planétaires au T1m (Télescope de un mètre) et il procéda à des modifications de son optique pour l’adapter à ses travaux.
Polarisation de la lumière sur les surfaces planétaires
C’est à la fin des années 60 qu’Audouin Dollfus fit moderniser le télescope en portant sa distance focale à 22 m pour ses travaux de polarimétrie. On fixa sur le tube une lunette auxiliaire de 32 cm en conservant le grand chercheur de 16 cm.
Le télescope est aujourd’hui utilisé par les étudiants du Master de l’Observatoire de Paris pour les travaux pratiques d’observation.