Depuis 20 ans, l’équipe fait des recherches systématiques en radio, dans la raie spectrale de 21 cm du gaz d’hydrogène neutre (HI), pour débusquer des galaxies massives à faible brillance de surface, dites LSB.
L’année dernière, au cours d’une campagne d’observation à Green Bank (Etats-Unis), alors qu’il s’agissait de confirmer la détection d’une galaxie LSB faite en France, à l’Observatoire radioastronomique de Nançay, une erreur s’est glissée dans la saisie de coordonnées célestes avec pour conséquence de pointer le grand radiotélescope dans une mauvaise direction. À la surprise générale, un signal de raie HI a été détecté, ressemblant à celui d’une galaxie massive et ce, alors même qu’aucune galaxie n’apparaissait sur les images optiques relevées dans la même position.
Lire aussi l’information [en anglais]
sur le site de l’Observatoire Green Bank :
"Astronomers Accidentally Discover Dark Primordial Galaxy"
Pour déterminer la taille et la cinématique de l’objet détecté, s’en est suivie, au radiotélescope de Green Bank, une série d’observations complémentaires.
Une galaxie pas comme les autres
Les données obtenues ressemblent à celles d’une galaxie massive : avec un contenu total en gaz HI de presque 2 milliards de masses solaires, soit moitié moindre que celui de la Voie lactée, la galaxie sombre J0613+52 tourne sur elle-même à une vitesse de 100 km/s.
Situé à environ 270 millions d’années-lumière - et non aux confins de l’Univers -, cet objet est supposé contenir en grande quantité du gaz primordial intact, très peu dense, incroyablement diffus. Et, pour avoir si peu formé d’étoiles (leur nombre restant à confirmer), il semble aussi être très isolé, n’ayant jamais subi de perturbation avec des galaxies voisines.
Approfondissement des investigations
Si les images optiques n’ont révélé aucune présence, c’est qu’elles ne sont pas suffisamment profondes pour détecter les galaxies LSB aux niveaux de luminosité de surface les plus bas découverts jusqu’à présent.
Des images optiques très profondes sont donc nécessaires pour quantifier le nombre d’étoiles "cachées" sous le niveau de bruit des images déjà existantes. Afin de les obtenir rapidement, d’autres astronomes français ont rejoint l’équipe, opérant sur des télescopes optiques, tels que ceux de l’Observatoire de Haute Provence et du CERGA.
L’existence de galaxies sombres massives est prédite par les théories de formation de galaxies mais, comme elles ne contiennent que très peu d’étoiles pour leur taille, elles sont difficiles à détecter sur les images.
Des détections d’autres galaxies "sombres", comme celles du type de J0613+52, vont permettre de tester et contraindre les théories. Le satellite Euclid, lancé en juillet 2023, et le futur observatoire au sol Vera Rubin rechercheront ces objets par voie optique, tandis qu’aux longueurs d’onde radio, les télescopes existants et le futur radiotélescope géant Square Kilometre Array, en cours de construction, tenteront de détecter leur gaz froid.
Contributions scientifiques :
L’équipe est dirigée par Karen O’Neil de l’Observatoire Green Bank aux USA. Son collaborateur en France est Wim van Driel de l’Observatoire de Paris - PSL.
Des observations de 350 galaxies LSB ont été réalisées avec trois radiotélescopes :
- à l’Observatoire Radioastronomique de Nançay en Sologne,
- à Green Bank (Etats-Unis - Virginie occidentale),
- et avec le télescope d’Arecibo (Porto Rico), aujourd’hui effondré.
Dernière modification le 5 août 2024