Du nuage à l’étoile et au système planétaire
La transformation d’un nuage turbulent d’hydrogène en une étoile entourée de planètes est complexe. Lorsque les étoiles se forment à partir de leurs nuages natals, elles collectent le gaz environnant et l’aplatissent pour former un disque dense et poussiéreux. En se nourrissant du gaz de ce disque, les jeunes étoiles émettent de puissants jets étroits et des vents larges et lents. À mesure que l’accrétion ralentit, les planètes commencent à se former, à partir d’amas de grains de poussière.
Dans un article de recherche récent, les observations du JWST éclairent les détails de ce processus, mettant en lumière les vents et les jets des disques entourant les jeunes étoiles.

La vision du télescope James Webb
Naman Bajaj (Laboratoire lunaire et planétaire, Université de l’Arizona) et ses collaborateurs (dont Sylvie Cabrit, LUX, Observatoire de Paris - PSL) ont étudié quatre disques protoplanétaires à l’aide du spectrographe proche infrarouge (NIRSpec) du JWST. Les quatre disques – Tau 042021, HH 30, FS Tau B et IRAS 04302 – se situent dans la région de formation d’étoiles du Taureau, vieille de 1 à 2 millions d’années et distante d’environ 450 années-lumière.
Chacun de ces disques présente des jets étroits qui émergent perpendiculairement au-dessus et au-dessous du disque, imbriqués dans de larges vents coniques. Les disques ont été sélectionnés pour leur angle de vue “par la tranche”, qui met en valeur les jets et les vents qui en émergent et les éventuelles asymétries d’éjection entre les deux cotés du disque.
L’équipe de Bajaj a identifié plus de 40 raies d’émission dans chaque jet, ce qui lui a permis de déterminer leurs propriétés telles que leur densité et leur vitesse de choc. Un aspect important de ces observations est l’estimation de la masse emportée par les jets. En utilisant trois méthodes indépendantes, l’équipe a constaté que les taux de perte de masse des jets pour les quatre disques étaient en moyenne de quelques milliardièmes de masse solaire par an, ce qui représente environ 10% de la masse moyenne accrétée par l’étoile centrale.

Le jet ondulant de Tau 042021
Bien que semblant jaillir directement du disque, chacun des jets étudiés présentait des signes d’oscillations latérales. Les jets de Tau 042021 sont particulièrement intéressants, présentant une oscillation symétrique en miroir, où les deux lobes opposés du jet oscillent en reflet l’un de l’autre. À l’heure actuelle, la seule explication à ces oscillations synchronisées est un compagnon binaire. En modélisant les ondulations du jet comme émanant d’une étoile en orbite dans un système binaire, les auteurs ont conclu que Tau 042021 contient probablement une étoile de 0,33 masse solaire et une autre de 0,07 masse solaire, séparées de 1,35 fois la distance Terre-Soleil et parcourant leur orbite en 2,5 ans.
Bajaj et ses coauteurs ont présenté un riche ensemble de données éclairant le comportement des jets provenant d’étoiles jeunes. Leurs travaux ne sont pas encore terminés ; il s’agit du deuxième article de recherche produit par l’équipe à partir de ces données du JWST, et d’autres sont en préparation.
Référence
“Class I/II Jets with JWST : Mass-Loss Rates, Asymmetries, and Binary-Induced Wigglings,” Naman S. Bajaj et al 2025 AJ 169 296. arxiv.org/abs/2503.23319