La récente cartographie de tout le ciel en proche infra-rouge, par le projet américain 2MASS apporte aujourd’hui plus de résolution. Un astronome de l’Observatoire de Paris, Christophe Alard, propose qu’une deuxième barre existe à l’intérieur de la première. Cette deuxième barre permettrait de mieux comprendre la dynamique de la matière au centre, par exemple fournirait un moteur pour alimenter en gaz le trou noir central.
Notre Galaxie, la Voie Lactée, ne peut pas être observée dans son ensemble dans les longueurs d’ondes visibles, car la poussière nous cache les parties lointaines. Une "photo" optique ne révèle ainsi que les régions d’avant-plan. La faible sensibilité de la lumière infrarouge à l’extinction interstellaire permet de révéler la structure de la Galaxie avec une qualité étonnante. Le satellite COBE de la NASA a effectué des cartographies infrarouge de notre Galaxie, comme on peut le voir dans la Figure 1. Figure 1 : Une vue de la Galaxie obtenue par le satellite COBE dans le proche infrarouge Cependant la résolution spatiale de COBE reste faible, et peut être grandement améliorée grâce aux nouvelles données mises à disposition par le relevé infrarouge du ciel 2MASS (cf Figure 2).
Figure 2 : Une vue à haute résolution de la région du bulbe Galactique obtenue à partir des catalogues stellaires du relevé 2MASS L’extinction interstellaire forte et très variable qui règne dans la région du bulbe galactique rend la réalisation d’une carte particulièrement difficile, même en bande K (longueur d’onde 2 microns). Il est cependant possible de réduire considérablement la sensibilité à l’extinction en combinant 2 bandes photométriques de façon à annuler l’effet de l’extinction. Après application de plusieurs lissages adaptatifs et l’utilisation de propriétés de symétrie, les comptages dans cette bande insensibles à l’extinction permettent de réaliser la carte ci dessous (Figure 3). Les 3 derniers isocontours de cette carte illustrent parfaitement l’asymétrie en longitude (gauche-droite) qui révèle la structure de barre formée par les parties centrales du disque Galactique. En effet, la barre est inclinée par rapport à la ligne de visée, et la partie venant vers nous (à droite), plus proche, apparaît plus grosse que la partie plus éloignée (à gauche). Figure 3 : Image détaillée de la région centrale après soustraction de la densité associée à la barre Galactique Ainsi est mise en évidence une nouvelle composante : une petite barre près du centre de la barre principale. C’est une deuxième petite barre, à l’intérieur d’une plus grande barre, déjà mise en évidence depuis les années 1970, et confirmée par le satellite COBE. L’image de la Figure 3 représente la densité restante obtenue après soustraction de la barre principale. Cette densité est très significative et est dominante à moins de 1 degré du centre Galactique. La soustraction de la barre Galactique a pu être effectuée sans faire d’hypothèses restrictives quand à sa forme. La seule hypothèse nécessaire à cette soustraction consiste à supposer que la densité de surface de la barre décroît de façon exponentielle avec le rayon. Cette hypothèse est bien verifiée dans les simulations numériques. On notera la forte asymétrie en longitude de la barre secondaire. Il est intéressant de remarquer que cette asymétrie est orientée dans un sens opposé à l’asymétrie observée pour la barre dominante. Cette différence d’orientation ne peut être due à un effet résiduel de l’extinction, car l’extinction est plus élevée à l’endroit ou un excès de comptage est observé. Ceci signifie donc clairement que nous avons bien affaire à une nouvelle composante. De plus le fait que cette composante est applatie et asymétrique indique qu’elle a très probablement une forme de barre. La présence d’une barre secondaire, à l’intérieur de la barre primaire, est un phénomène assez commun pour des Galaxies spirales barrées du type de la Voie Lactée (figure 4). Le satellite GAIA aura les moyens de confirmer sa présence.
Figure 4 Exemples de barre secondaire à l’intérieur d’une barre primaire, dans les galaxies spirale barrées NGC 1433 (gauche), et NGC 5566 (droite), d’après Jungwiert, Combes, Axon (1997, A&AS 125, 479)