Illustration par défaut
1er octobre 2001 "Ça s'en va et ça revient..."

L’environnement d’un amas de galaxies représente un laboratoire idéal pour tester le comportement de la matière interstellaire dans des conditions extrêmes. Une des interactions les plus spectaculaires est celle de la galaxie avec le gaz diffus et très chaud qui baigne l’amas entier (gaz intra-amas).

Un groupe de scientifiques français et allemands mènent un programme étudiant l’évolution des galaxies dans l’environnement des amas. Avec l’aide d’un modèle numérique ainsi que de nouvelles observations interférométriques, ils ont obtenu une meilleure compréhension de l’évolution des galaxies spirales dans les amas. Un résultat important de leurs simulations est que, dans certaines conditions, une partie considérable de la matière interstellaire, balayée par l’interaction galaxie-amas, peut retomber sur le disque de la galaxie.

Balayage du gaz par pression dynamique

L’observation du gaz des galaxies spirales de l’amas de la Vierge a montré que les disques d’hydrogène atomique (HI) des galaxies d’amas sont perturbés et leur taille considérablement réduite. Cependant, leur contenu moléculaire semble être inchangé. Ces résultats suggèrent que le balayage du gaz dû au mouvement rapide de la galaxie dans le gaz intra-amas est responsable de la déficience HI et de la déformation des disques des galaxies d’amas. Quand une galaxie spirale riche en gaz tombe dans un amas de galaxies pour la première fois, elle peut perdre son gaz pendant l’interaction avec l’amas. Il y a une très grande quantité de gaz chaud ( 107 K) et diffus ( 10-4 cm-3) dans l’amas (plusieurs 1013 masses solaires). Dans le système de réference de la galaxie qui tombe, la matière interstellaire est exposée à un vent, dû à son mouvement rapide dans le gaz chaud. Ce vent pousse le gaz de la galaxie dans la direction opposée à son mouvement dans l’amas. C’est le balayage par pression dynamique. Cet effet a été identifié dans les années 70. Néanmoins, on ne sait pas encore clairement où et quand les galaxies perdent leur gaz. Le meilleur endroit pour étudier le balayage du gaz par pression dynamique est l’amas de la Vierge car c’est l’amas le plus proche, qui peut donc être observé avec plus de détails.

Les simulations 

L’efficacité du balayage par pression dynamique dépend crucialement des orbites des galaxies. Sur des orbites radiales, les galaxies pénètrent plus profondèment dans le potentiel de l’amas, et leur vitesse augmente considérablement là où la densité de galaxies et la densité du gaz intra-amas sont plus grandes. Dans une première étape, on calcule les orbites des galaxies dans l’amas, afin de déterminer la variation temporelle de pression dynamique. Une simulation tridimensionnelle est alors effectuée pour suivre la cinématique du gaz d’une galaxie spirale tombant dans l’amas de la Vierge. Les particules représentent les nuages de gaz qui évoluent dans un potentiel de gravité analytiquement fixé pour la galaxie ; elles peuvent subir des collisions non élastiques et sont accélérées par la pression dynamique quand la galaxie se déplace dans le gaz chaud. L’efficacité du balayage dépend de l’excentricité de l’orbite et de l’angle de inclination entre le disque de la galaxie et le plan orbital. Plusieurs simulations avec différentes orbites ont été calculées. Une de ces simulations est montrée en figure 1. La galaxie est vue de face et tombe vers la gauche vers la gauche, c.-à-d. le vent vient du coin gauche inférieur (flèche). La longueur de la flèche est proportionnelle à la force de la pression dynamique. Pendant
le passage au plus proche du centre de l’amas, le vent est maximum (t=0).

Les observations

Pour tester les résultats des simulations, on a besoin d’observations de la matière interstellaire des galaxies spirales d’amas, avec une grande résolution spatiale. C’est pourquoi des observations interférométriques ont été obtenues (Fabry-Perot à l’OHP, Haute Provence, au CFHT à Hawaii, à l’IRAM, près de Grenoble, au VLA, USA), qui permettent d’obtenir aussi le champ de vitesses, pour tester la cinématique. En outre, les observations dans différentes longueurs d’onde sont nécessaires (Halpha, HI, CO) afin d’étudier comment les différentes phases gaseuses (gaz ionisé, atomique, moléculaire) se comportent sous l’influence de la pression dynamique.

Confrontation entre les observations et les simulations

Les observations interférométriques de deux galaxies dans l’amas de la Vierge (NGC 4522 et NGC 4654) et une galaxie dans l’amas de Coma (NGC 4848) ont été comparées aux simulations. Les déficiences en gaz HI des galaxies, les distances projetées au centre de l’amas, et les vitesses radiales donnent des contraintes sur le choix des paramètres orbitaux et du temps écoulé puisque la plus courte distance au centre de l’amas.

Cette galaxie est localisée à 1 Mpc au sud du centre de l’amas de la Vierge (M87). La distribution de gaz ionisé (figure 2 en haut) et le champ de vitesses (figure 2 en bas) observés dans la raie Halpha correspondent à une structure de boucle en expansion due à la ré-accrétion d’une partie de la matière interstellaire qui a été expulsée par pression dynamique. L’angle entre le disque et le plan orbital est 30o.

NGC 4654 
Cette galaxie est également localisée à 1 Mpc de M87. La boucle étendue au sud-est, de faible densité, représente le même système dynamique que pour NGC 4522 : une coquille asymétrique en expansion. Ici, la boucle est ouverte d’un côté. Ceci se produit aux étapes finales de l’expansion, lors d’un balayage par la tranche. 

NGC 4848 
Cette galaxie de l’amas de Coma a été observée en Halpha, CO, continuum radio à 20cm, et HI (figures 4 et 5). La distribution et la cinématique du gaz sont conformes à un scénario où la galaxie émerge du centre de l’amas. Son orbite est fortement excentrique, c.-à-d. le balayage par pression dynamique a été très efficace.

Futurs développements

La comparaison détaillée des observations multi-longueur d’onde pour d’autres galaxies de la Vierge sont en cours. Il est projeté de rentrer plus en détails dans la physique de base de la matière interstellaire, formation d’étoiles et transitions de phase. Pour étendre le code numérique, il est prévu de : * inclure une recette pour la formation d’étoiles ; * inclure 50000 particules pour simuler le halo, le disque et le bulbe de la galaxie.

NGC 4522 
Cette galaxie est localisée à 1 Mpc au sud du centre de l’amas de la Vierge (M87). La distribution de gaz ionisé (figure 2 en haut) et le champ de vitesses (figure 2 en bas) observés dans la raie Halpha correspondent à une structure de boucle en expansion due à la ré-accrétion d’une partie de la matière interstellaire qui a été expulsée par pression dynamique. L’angle entre le disque et le plan orbital est 30o.

  NGC 4654
Cette galaxie est également localisée à 1 Mpc de M87. La boucle étendue au sud-est, de faible densité, représente le même système dynamique que pour NGC 4522 : une coquille asymétrique en expansion. Ici, la boucle est ouverte d’un côté. Ceci se produit aux étapes finales de l’expansion, lors d’un balayage par la tranche.

NGC 4848 
Cette galaxie de l’amas de Coma a été observée en Halpha, CO, continuum radio à 20cm, et HI (figures 4 et 5). La distribution et la cinématique du gaz sont conformes à un scénario où la galaxie émerge du centre de l’amas. Son orbite est fortement excentrique, c.-à-d. le balayage par pression dynamique a été très efficace.

References

  • Vollmer, B. ; Cayatte, V. ; Boselli, A. ; Balkowski, C. ; Duschl, W. J.,"Kinematics of the anemic cluster galaxy NGC 4548. Is stripping still active ?", 1999,
  • A&A, 349, 411. Vollmer, B. ; Marcelin, M. ; Amram, P. ; Balkowski, C. ; Cayatte, V. ; Garrido, O., "The consequences of ram pressure stripping on the Virgo cluster spiral galaxy NGC 4522", 2000,
  • A&A, 364, 532 Vollmer, B. ; Braine, J. ; Balkowski, C. ; Cayatte, V. ; Duschl, W. J., "12CO(1-0) observations of NGC 4848 : A Coma galaxy after stripping", 2001,
  • A&A, 364, 824 Vollmer, B. ; Cayatte, V. ; Balkowski, C. ; Duschl, W.J., "Ram pressure stripping and galaxy orbits : The case of the Virgo cluster", 2001, ApJ, accepted for publication ; astro-ph/0 107237.

Contact

  • Chantal Balkowski (Département DAEC, Observatoire de Paris, France)
  • Bernd Vollmer (Max-Planck-In stitut fuer Radioastronomie, Bonn, Germany)
  • Veronique Cayatte (Département DAEC, Observatoire de Paris, France)