L’abondance de lithium dans les étoiles pauvres en métaux est-elle "universelle" ? F. et M. Spite (1982) ont trouvé une même abondance de lithium dans toutes les vieilles étoiles normales déficientes en métaux, un peu plus chaudes que le Soleil (semblables aux étoiles du coude des amas globulaires) : l’abondance est indépendante de la température et de la métallicité. Dans un graphique, l’abondance du lithium, fonction de la métallicité, dessine un plateau, quelquefois appelé le plateau des Spite. Ces auteurs proposèrent alors d’identifier l’abondance de ce plateau à l’abondance de lithium (primordial) produite dans le big bang, L’abondance du lithium produit par le big bang d’après WMAP
Récemment, les mesures du satellite WMAP ont permis de déterminer les paramètres du modèle de nucléosynthèse du big bang, et on en déduit l’abondance du lithium ainsi produit :
cette abondance est deux ou trois fois plus forte que la valeur du plateau.
Comment expliquer cette différence ? Plusieurs théories proposent des destructions uniformes partielles de ce lithium abondant, formant ainsi un plateau (bas) qui serait conforme aux observations.Extension du plateau jusqu’aux étoiles de métallicités extrêmement faibles ?
Bonifacio et al. (2007, FIRST STARS VII) ont entrepris de vérifier la validité du plateau pour les naines de métallicité extrêmement faible : on trouve alors que l’abondance du lithium du plateau semble plus basse en moyenne, ou plus dispersée (vers le bas). Cette baisse ou cette dispersion pourrait suggérer une destruction variable du lithium.
Figure 1 : L’abondance de lithium en fonction de la métallicité (abondance en fer) pour le CS 22876-032 (cercles) et pour d’autres naines pauvres en métaux étudiées par Asplund et al. (2006, triangles) et Bonifacio et al. (2007, losanges). Le plateau apparaît plus complexe aux métallicités très faibles.
En abscisse et en ordonnée, les abondances sont notées : [Fe/H]=log[N(Fe)/N(H)]ETOILE-log[N(Fe)/N(H)]SOLEIL and A(Li)=log[N(Li)/N(H)]+12, respectivement.
Une étoile cruciale De nouvelles observations détaillées (spectres UVES obtenus au VLT, ESO) de la naine BPS CS 22876–032 apportent des éléments nouveaux. Cette étoile a la métallicité la plus faible connue jusqu’à présent pour une naine. C’est une binaire spectroscopique composée de deux naines : formées à partir du même nuage, ces deux naines sont supposées avoir la même composition chimique. A partir de spectres pris à plusieurs phases, une analyse basée sur les couleurs et sur les isochrones de Chieffi & Limongi indique que les composantes ont bien la même composition en métaux, mais que si la primaire (plus chaude) a l’abondance de lithium du plateau des Spite, la secondaire a une abondance plus faible. L’extension du plateau est confirmé par la primaire, mais pas par la secondaire. Des modèles d’atmosphères stellaires 3D (hydrodynamiques) ont été
calculés, ils donneraient des abondances de lithium un peu plus faibles pour chaque composante, mais un écart encore un peu plus grand entre les deux composantes. Ce résultat ne permet pas de conclure, mais encourage à poursuivre et améliorer l’observation d’étoiles extrêmement déficientes en métaux, qui apportent, de plus, des informations sur les premières étoiles de notre Galaxie. First stars XI. Chemical composition of the extremely metal-poor dwarfs in the binary CS 22876-032 González Hernández, J. I., Bonifacio, P., Ludwig, H.-G., Caffau, E., Spite, M., Spite, F., Cayrel, R., Molaro, P., Hill, V., François, P., Plez, B., Beers, T. C., Sivarani, T., Andersen, J., Barbuy, B., Depagne, E., Nordström, B., & Primas, F. Astronomy & Astrophysics, Volume 480, Issue 1, March II 2008, pp.233-246
Contact
- Jonay I. González Hernández (Observatoire de Paris, GEPI,CIFIST Marie Curie Excellence Team) Ce travail a été mené d’abord dans le cadre du programme
ESO : FIRST STARS (P. I. :R. Cayrel, et ensuite dans le contrat européen "CIFIST Excellence team Marie Curie" conduit par P. Bonifacio.
Dernière modification le 21 décembre 2021