Dans cinq milliards d’années, le Soleil se transformera en étoile géante rouge, avec une taille plus de 100 fois plus grande qu’aujourd’hui.
Il perdra alors une partie importante de sa masse par l’intermédiaire d’un vent stellaire très intense.
Le produit final de son évolution sera une minuscule naine blanche, d’une taille proche de celle de la Terre, chaude et extrêmement dense (une cuillère à café de matière de naine blanche a une masse de l’ordre de 5 tonnes !).
Cette métamorphose aura un impact dramatique sur les planètes du Système solaire, et en particulier sur les planètes les plus internes (Mercure, Vénus et la Terre).
Les modèles indiquent que Mercure et Vénus seront absorbées par l’étoile géante, et très probablement détruites, mais le destin de la Terre est plus incertain.
Du fait de l’augmentation considérable de la luminosité du Soleil, notre planète deviendra hostile à toute forme de vie dans quelques milliards d’années. Mais la Terre elle-même, en tant que planète rocheuse, pourrait survivre et continuer à orbiter autour de la naine blanche solaire.
Pour élucider cette question, une équipe internationale d’astronomes menée par Pierre Kervella, Astronome de l’Observatoire de Paris au Laboratoire Franco-Chilien d’Astronomie (CNRS UMI 3386 / Universidad de Chile) et au Laboratoire d’Etudes spatiales et d’instrumentation en astrophysique (Observatoire de Paris /CNRS /UPMC / Université Paris Diderot) [1] a observé L2 Puppis, une étoile évoluée à l’aide du grand radiotélescope ALMA [2].
L2 Pup est une étoile proche du Soleil (208 années-lumière), qui est entourée d’un disque constitué à partir du gaz et de la poussière éjectés par l’étoile centrale.
ALMA a fourni une mesure très précise de la vitesse orbitale du gaz dans le disque de L2 Pup, ce qui a permis aux astronomes de démontrer qu’elle suit précisément la troisième loi de Kepler.
Les chercheurs en ont déduit la masse de L2 Pup : deux tiers de celle du Soleil.
Connaissant cette masse, les modèles d’évolution stellaire prévoient que l’âge de L2 Pup est de 10 milliards d’années.
Il y a cinq milliards d’années, L2 Pup était donc une jumelle presque parfaite du Soleil actuel.
Le tiers de masse solaire manquant a été perdu par L2 Pup au cours de son évolution. Nous avons ainsi, à 208 années-lumière de la Terre, un point de vue exceptionnel sur le futur lointain de notre étoile.
Près de l’étoile L2 Pup elle-même, les astronomes ont identifié une seconde source cent fois plus faible, L2 Pup B.
A une séparation de deux fois la distance Terre-Soleil (soit 300 millions de kilomètres), sa faible masse implique qu’il s’agit d’une planète (ou d’une petite "naine brune").
La présence d’une planète en orbite dans le disque de L2 Pup nous donne une aperçu du devenir des planètes du Système solaire.
La luminosité élevée de L2 Pup B et la coïncidence de sa position avec un long et très fin panache de poussière indiquent qu’elle pourrait être en train d’accréter de la matière expulsée par l’étoile centrale.
L’observation des interactions entre L2 Pup et sa planète au cours des prochaines années nous donnera de précieuses informations sur l’évolution finale du Soleil, son impact sur les planètes du système solaire.
Que la Terre survive au Soleil ou disparaisse avec lui est encore incertain, et L2 Pup pourrait être la clé qui permettra de répondre à cette question.
Article de recherche
"ALMA observations of the nearby AGB star L2 Puppis - I. Mass of the central star and detection of a candidate planet", P. Kervella, W. Homan, A. M. S. Richards, L. Decin, I. McDonald, M. Montargès, and K. Ohnaka, Astronomy & Astrophysics
http://dx.doi.org/10.1051/0004-6361/201629877
https://arxiv.org/abs/1611.06231
Interféromètre ALMA : http://www.almaobservatory.org
[1] P. Kervella (CNRS UMI 3386/U. de Chile/Obs. de Paris/LESIA), W. Homan (Univ. Catholique de Louvain, Belgique), A. M. S. Richards (U. of Manchester, Royaume-Uni), L. Decin (Univ. Catholique de Louvain, Belgique), I. McDonald (U. of Manchester, Royaume-Uni), M. Montargès (IRAM, France), and K. Ohnaka (U. Catolica del Norte, Chili)
[2] ALMA est le plus grand radiotélescope au monde aux longueurs d’onde millimétriques. Il est installé sur le haut-plateau de Chajnantor dans le désert d’Atacama (Chili), et est constitué de 66 télescopes individuels utilisés conjointement pour synthétiser l’équivalent d’un radiotélescope géant de 16 kilomètres de diamètre.
Dernière modification le 21 décembre 2021