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Des collisions violentes peuvent-elles structurer les disques circumstellaires ?

1er septembre 2006 Des collisions violentes peuvent-elles structurer les disques circumstellaires ?

Autour des étoiles de séquence principale qui ont formé un système planétaire, comme par exemple le Soleil, il est fréquent de trouver un disque de poussière. Celle-ci est chauffée par l’étoile centrale, et son émission thermique est observée entre l’infra-rouge moyen et le sub-millimétrique. De même qu’autour du Soleil la poussière zodiacale provient des débris de comètes et d’astéroïdes, les disques de débris sont formés par des morceaux qui restent de la formation du système exo-planétaire. L’asymétrie observée dans ces disques de débris était jusqu’à présent considérée comme un traceur de planètes non encore observées. Une équipe internationale, qui comprend un astronome de l’Observatoire de Paris, propose que ces asymétries pourraient aussi provenir de la destruction par collision violente d’un gros planétesimal relâchant une large quantité de poussières dans le disque.

Au cours des deux dernières décennies, quantité de disques circumstellaires ont été détectés puis imagés grâce à l’émission thermique et à la lumière diffusée par la poussière qu’ils contiennent. Ces disques peuvent schématiquement être divisés en deux catégories : les disques « protoplanétaires », massifs et riches en gaz, censés correspondre aux premières étapes de la formation de systèmes planétaires, et les disques de « débris », plus ténus et pauvres en gaz, correspondant a des systèmes plus évolués pour lesquels le gros de l’accrétion planétaire aurait déjà eu lieu. Dans ces disques de débris, la poussière observée serait produite par collisions entre les « restes » laissés par le processus de formation planétaire (pour plus de détails, voir par ex. l’excellente série de cours de Mark Wyatt : http://www.ast.cam.ac.uk/ wyatt/ ).

Figure 1 : Simulation numérique de l’évolution d’une avalanche collisionnelle dans un disque de débris : Initialement un corps de 40 km est brisé à20 UA de l’étoile et relâche 1020g de poussières. L’échelle de couleur indique la densité surfacique de poussières. L’echelle de temps totale est de 1000 ans.

Un des enseignements majeurs de ces observations est que presque aucun disque de débris ne semble être régulier et symétrique. On observe presque toujours des structures, parfois très marquées : bras spiraux, anneaux fins ou larges, « grumeaux », asymétries de brillance, etc. (pour un bel « album de famille » des disques de débris : voir http://astro.berkeley.edu/ kalas/disksite/pages/gallery.html). On a le plus souvent tendance à expliquer ces structures par la présence de planètes non-détectées ou de compagnons stellaires, dont les perturbations gravitationnelles affecteraient profondément la distribution de la poussière observée. Une équipe regroupant des chercheurs de l’Observatoire de Paris et de l’Université de Stockholm a ainsi récemment exploré un scénario alternatif, ne faisant pas directement appel à la présence de planètes invisibles, dans lequel la source de ces asymétries est un événement isolé et violent : la destruction par collision violente d’un gros planétesimal relâchant une large quantité de poussières dans le disque. Le point fondamental est ici que les conséquences d’un tel événement peuvent dépasser de loin l’excès initial de poussières produit par la seule destruction du planetesimal : les plus petits grains initialement relâchés sont en effet éjectés par la pression de radiation de l’étoile vers l’extérieur du système et peuvent percuter des grains « au repos » plus loin dans le disque ; ces nouvelles collisions produisant une nouvelle génération de petits grains qui vont eux-mêmes être éjectés vers l’extérieur et impacter en chemin d’autres grains, etc ...

Pour étudier ce mécanisme complexe de réaction en chaîne, un modèle numérique novateur a été mis au point, permettant de suivre à la fois l’évolution dynamique et l’évolution en taille d’un disque de poussières. Les résultats obtenus ont montré que ces « avalanches » collisionnelles sont un mécanisme très efficace, se déployant sous forme de structures spirales dans le système (Figure 1), dont l’amplitude dépend très fortement (quasi-exponentiellement) de la densité de poussière dans le disque. Pour des disques de débris de densité légèrement supérieure à celle du système type qu’est Beta-Pictoris, les asymétries créées par une avalanche collisionnelle pourraient ainsi devenir détectables, sous forme de bras spiraux pour les disques vus de face ou d’asymétries de brillance pour ceux vus par la tranche.