Les étoiles les moins massives se nomment "étoiles naines ultra-froides". Leur taille avoisine celle de Jupiter. Mais, comparées à notre Soleil, elles sont plus de deux fois plus froides, dix fois moins massives et cent fois moins lumineuses. Leur durée de vie est plus de cent fois supérieure à celle de notre étoile. Et, ce seront les derniers astres à briller lorsque l’Univers deviendra froid et sombre.
Bien que nettement plus répandues dans l’Univers que les étoiles s’apparentant à notre Soleil, ces étoiles sont encore très mal comprises, du fait de leur faible luminosité. En particulier, on sait très peu de choses sur leur population planétaire, alors que celle-ci représente une fraction importante des planètes contenues dans notre Voie lactée.
C’est dans ce contexte que le projet SPECULOOS, - dirigé par l’Université de Liège et auquel participent des chercheurs belges, français, suisses, anglais et américains -, a permis la mise au jour d’une nouvelle planète de taille terrestre, en orbite autour d’une étoile naine ultra-froide : SPECULOOS-3.
Le projet SPECULOOS Le projet SPECULOOS (Search for Planets EClipsing ULtra-cOOl Stars), initié et dirigé par l’astronome Michael Gillon de l’Université de Liège, a été spécialement conçu pour la recherche d’exoplanètes autour des étoiles naines ultra-froides les plus proches. Celles-ci sont dispersées dans le ciel, et il faut donc les observer une par une, pendant des semaines, pour avoir une bonne chance de détecter des planètes en transit. Pour cela, il faut un réseau dédié de télescopes robotiques professionnels. C’est le concept de SPECULOOS, mené conjointement par les Universités de Liège, de Cambridge, de Birmingham, de Berne, le MIT, et l’ETH Zürich. |
C’est seulement le deuxième système planétaire découvert autour de ce type d’étoile, après le fameux système TRAPPIST-1 en 2017, lequel compte sept planètes de taille terrestre, dont plusieurs potentiellement habitables.
L’exoplanète SPECULOOS-3b se trouve à environ 55 années-lumière de la Terre (ce qui est très proche à l’échelle cosmique, notre galaxie s’étirant sur 100 000 années-lumière). Sa taille est pratiquement la même que celle de notre planète.
Singularité
Sur SPECULOOS-3b, une année – à savoir le temps que la planète met à faire le tour de son étoile - dure environ 17 heures. Et, les jours et les nuits ne s’y terminent peut-être jamais… On pense en effet que la planète est en rotation synchrone par rapport à son étoile, à l’instar de la Lune en orbite autour de la Terre. Ainsi, un même côté, appelé "côté jour", fait toujours face à l’étoile, tandis qu’un "côté nuit" serait enfermé dans une obscurité sans fin.
L’étoile hôte, SPECULOOS-3, est plus de deux fois plus froide que notre Soleil, avec une température moyenne d’environ 2 600 °C. Du fait de son orbite hyper courte, la planète reçoit bien plus d’énergie par seconde que la Terre n’en reçoit du Soleil : près de 16 fois plus. Elle est littéralement bombardée de radiations de haute énergie. Dans un tel environnement, la présence d’une atmosphère autour de la planète est très peu probable.
Cependant, dépourvue d’atmosphère, SPECULOOS-3b s’avère être une excellente cible pour le James Webb, le télescope spatial géant lancé en 2021.
« Avec le James Webb Télescope, nous pourrions étudier la minéralogie de la surface de la planète ! » précise Elsa Ducrot, ancienne chercheuse de l’Université de Liège, actuellement en postdoc à l’Observatoire de Paris-PSL au sein du Laboratoire d’étude spatiales et d’instrumentation en astrophysique.
En s’offrant comme une cible privilégiée aux observations du James Webb Télescope, SPECULOOS-3b serait alors la première exoplanète à dévoiler la composition de sa surface.
Référence :
Gillon, M., Pedersen, P.P., Rackham, B.V. et al. Detection of an Earth-sized exoplanet orbiting the nearby ultracool dwarf star SPECULOOS-3. Nature Astronomy (2024).
▶ https://doi.org/10.1038/s41550-024-02271-2
Dernière modification le 16 décembre 2024