Si les registres d’observations des Cassini en constituent le coeur, les archives conservées à l’Observatoire couvrent un large spectre et représentent pour l’histoire scientifique française une source de premier plan. Elles sont constituées de documents papier, pour la partie la plus ancienne, mais également de bien d’autres types de documents, notamment de très nombreuses archives photographiques.

Calames (inventaire en ligne)
Bibliothèque numérique (fonds consultables en ligne)

Les archives constituent le noyau des collections avec des documents inestimables pour l’histoire de la science en France et dans le monde.

Taches de la Lune, d’après Cassini I
Observatoire de Paris

Elles comprennent par exemple les archives astronomiques rassemblées dans toute l’Europe par Joseph-Nicolas Delisle au XVIIIe siècle -y figure notamment la correspondance de l’astronome polonais Hevelius (1611-1687)-, les registres d’observations des Cassini depuis les toutes premières observations de Jean-Dominique Cassini en 1669, les dessins des taches de la Lune réalisés à partir de ses observations par de grands dessinateurs, Sébastien Leclerc et Jean Patigny, les manuscrits relatifs au système métrique ou encore les archives du premier satellite astrométrique européen, Hipparcos.

Dessin de Japet, premier des satellites de Saturne découvert par Cassini, 6 novembre 1671

Dès sa fondation, les astronomes mesurent l’importance des archives et les conservent précieusement. Elles sont confiées à la Bibliothèque créée en 1785. L’état dressé en 1791 mentionne essentiellement les Registres originaux des observations faites à l’Observatoire royal de Paris de 1671 jusqu’à 1791, documents fondamentaux pour les astronomes, les historiens voire les météorologues, et les doubles d’autres registres de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. En 1795 entre à l’Observatoire une exceptionnelle collection de manuscrits scientifiques. C’est le point de départ d’un fonds unique au monde, qui s’est depuis lors enrichi continûment.

Les collections de Joseph-Nicolas Delisle (1688-1768)

Correspondance Hevelius, fonds Delisle

Les collections de Joseph-Nicolas Delisle (1688-1768) constituent un accroissement spectaculaire pour les archives : l’astronome a en effet acquis de très nombreux papiers scientifiques au cours de ses voyages en Allemagne et en Russie et pris soin de faire réaliser les copies des manuscrits astronomiques qu’il ne pouvait acheter. Sa correspondance est aussi partie intégrante de sa collection : de 1709 à 1767, Delisle est en effet en relation épistolaire avec les principaux astronomes de son temps et fait converger vers lui des observations réalisées dans toute l’Europe. A son retour en France en 1747, Delisle échange ses collections contre une rente viagère et le titre d’astronome de la Marine : c’est ainsi que ses livres et manuscrits passent vers 1750 au Dépôt de la Marine.

En 1795, le Comité de Salut public décide que la partie astronomique de cette collection (livres et manuscrits) sera remise au Bureau des Longitudes, institution créée la même année pour administrer l’Observatoire.

Le Bureau des longitudes : une période fondatrice

Feuille de présence du Bureau des longitudes, 1re séance tenue à l’Observatoire de Paris, 6 pluviôse an XII

Aux manuscrits Delisle viennent s’ajouter des dons consentis par des membres du Bureau des Longitudes. Ceux de Cassini IV sont particulièrement importants. Le 26 mars 1822, il dépose entre les mains de Delambre les quinze volumes de calculs et travaux relatifs à l’Histoire céleste, c’est à dire le catalogue des positions de 48 000 étoiles construit par Lalande et son neveu. Le 8 janvier 1823, il écrit à « Messieurs les membres du Bureau des longitudes » pour leur faire hommage d’une collection de manuscrits qu’il juge plus précieuse encore, celle rassemblée par sa famille. On y trouve des pièces exceptionnelles comme l’Atlas des taches de la Lune qui comporte 57 planches de dessins au crayon noir et à la sanguine réalisée par Jean Patigny (av. 1632-1679) puis Sébastien Le Clerc (1637-1714) « sous les yeux et d’après les observations » de Cassini I, dessins qui ont servi à établir la célèbre Carte de la Lune. Elle comprend aussi un ensemble tout à fait remarquable d’observations astronomiques effectuées dans différentes parties du monde, des tables astronomiques chinoises, des lettres autographes, des mémoires et écrits divers de Cassini I, et des documents relatifs à l’histoire plus récente de l’Observatoire comme ceux qui concernent la réforme de 1785. Le « neveu » de Lalande (en fait le fils de son cousin germain) offre pour sa part à la Bibliothèque royale 14 registres d’observations astronomiques, qui sont dévolus en 1840 à l’Observatoire.

Le Bureau des longitudes a indéniablement pris conscience de l’importance des archives non seulement scientifiques, mais aussi institutionnelles : dès février 1823, il décide de conserver à l’avenir les minutes de toutes les lettres adressées à l’autorité, et deux ans plus tard d’aménager les anciens logements à l’Est de la méridienne, pour en faire une salle des archives au dessus d’une salle de réunion.

Des archives toujours plus riches et mieux signalées

Lettre de G. Libri au Directeur de l’Observatoire de Paris à propos de l’emprunt des manuscrits Hevelius

Dans les années 1840, les archives sont victimes de Guglielmo Libri (1803 ?-1869). Ce dernier, profitant des missions d’inspection à lui confiées, a pillé de très nombreuses bibliothèques publiques. A l’Observatoire, plus de 570 pièces ont été prélevées dans la seule correspondance d’Hevelius qui en comptait environ 2700. A la suite de ce vol, Ludovic Lalanne fait un premier inventaire des archives en 1851 mais ce dernier ne sera remis à l’Observatoire qu’en 1879. Le seul accès aux collections est un catalogue succinct et incomplet dressé en 1854. Un certain nombre de pièces volées seront cependant restituées au cours du XIXe siècle, notamment par l’entremise de la Bibliothèque nationale.

Le mouvement d’enrichissement du patrimoine impulsé par l’Amiral Mouchez dès son arrivée en 1878 bénéficie aux archives comme au Musée. L’Observatoire obtient le manuscrit de la 3e édition du Système du monde de Laplace, ceux de Lalande pour le passage de Vénus sur le Soleil en 1769, les manuscrits d’Arago et de Le Verrier remis par leurs familles. On note également en 1883 le don des observations manuscrites de l’astronome Honoré Flaugergues (1755-1835), qui s’étendent de 1782 à 1830, celui de manuscrits de l’astronome Yvon-Villarceau (1813-1883) ou encore la correspondance entre le baron de Zach et J.J. Lalande (1792-1804). Ce nouvel afflux s’accompagne du lancement d’un catalogue, l’Inventaire général et sommaire des manuscrits de la Bibliothèque de l’Observatoire de Paris, publié par Guillaume Bigourdan en 1895.

La suite de l’Inventaire général et sommaire est assurée par l’ouverture en 1921 d’une nouvelle série numérique démarrant au numéro 1001 tandis qu’entre 1922 et 1925, un dépouillement des archives du fonds Delisle est entrepris avec l’établissement d’un index alphabétique.

Evry Schatzman devant le radiotélescope de Nançay
Evry Schatzman devant le radiotélescope de Nançay

Au XXe siècle, les enrichissements les plus notables proviennent du versement des archives des directeurs et présidents de l’Observatoire ou de papiers de scientifiques (fonds Bernard Lyot, fonds Evry Schatzmann). Un dépôt important, celui des archives du Bureau des longitudes, est effectué au début des années 1980. La tradition des dons n’a pas totalement disparu : en 2008, l’Agence spatiale européenne a par exemple donné à l’Observatoire de Paris les archives relatives au satellite astrométrique HIPPARCOS, lancé en 1989.

Plus de 50% des fonds d’archives sont aujourd’hui inventoriés et accessibles via l’outil Calames mis en œuvre par l’ABES.

Modifié le 20 mars 2024