De revolutionibus orbium coelestium, soit: "des révolutions des orbes célestes"», est le livre fondamental de Nicolas Copernic (1473-1543).
Père de l’héliocentrisme, Copernic déloge la Terre de la position centrale et immobile qu’elle occupait dans le monde selon la conception cosmologique médiévale. Il remplace cette conception par celle d’une Terre tournant autour du Soleil posé comme immobile au centre du monde. La Terre n’est plus alors qu’une planète parmi les autres.
L’impact de cet ouvrage sur notre conception de l’Univers sera retentissant et durable. Jalon capital dans l’histoire des sciences, il bénéficie désormais d’une édition critique avec traduction et commentaires en français.
Un travail de longue haleine…
Parue en trois volumes en novembre 2015 aux Belles Lettres, cette édition est le fruit d’un travail d’envergure accompli pendant près de 40 ans.
Le travail sur le De revolutionibus a été conduit à l’Observatoire de Paris par l’équipe d’« Histoire de l’astronomie ancienne » au sein du département DANOF, devenu SYRTE en 2000, par un collectif de chercheurs aux compétences différentes. Son noyau originel, rassemblé autour de Jean-Pierre Verdet, comprenait, Michel-Pierre Lerner et Alain Segonds. Par la suite, Denis Savoie et Michel Toulmonde (chercheurs associés au Syrte) se joints à eux, ainsi que Concetta Luna et Isabelle Pantin.
Il a fallu, hélas, déplorer en 2011 la perte d’Alain Segonds, un des contributeurs essentiels de cette entreprise éditoriale et fondateur, aux Belles Lettres, de la Collection « Science & Humanisme » dans laquelle est publié ce Copernic.
La cérémonie, qui s’est tenue dans la salle Cassini, a été l’occasion non seulement de saluer l’immense travail accompli par les contributeurs, mais aussi de rendre un vibrant hommage à Alain Segonds.
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Genèse de l’édition critique
Tout a commencé en 1972, dans le cadre des préparatifs pour la célébration du Cinquième centenaire de la naissance de Copernic (1973).
L’Académie polonaise des sciences lance un projet d’envergure internationale consistant essentiellement en la production d’éditions critiques des œuvres de Copernic (pas seulement le De revolutionibus) et de traductions en diverses langues.
La France s’associe à ce projet avec l’appui du CNRS et de l’Observatoire de Paris.
L’équipe de chercheurs français publie dans un premier temps, avec le concours de Henri Hugonnard-Roche, des traductions du Commentariolus de Copernic et de la Narratio prima de Rheticus, premier exposé de la doctrine héliocentrique publié en 1540.
S’agissant de l’édition du texte critique latin et de la traduction française du De revolutionibus orbium coelestium (Nuremberg, 1543), le problème était plus complexe.
L’édition critique polonaise du De revolutionibus, fondée sur le manuscrit autographe de Copernic conservé à Cracovie, date de 1975. L’équipe française va faire un choix différent : au lieu de prendre pour base cette version autographe du De revolutionibus, qui n’a pas servi à l’impression de l’œuvre, elle décide de partir du texte publié en 1543 (réédité en 1566 et 1617), sans négliger toutefois l’autographe, en l’utilisant notamment là où il apporte un texte non fautif. L’idée est aussi de publier des parties importantes du manuscrit qui ne se retrouvent pas dans l’édition princeps.
L’établissement du texte latin, sa traduction, son commentaire : tel était l’objectif essentiel, mais non unique du travail de l’équipe. Il fallait aussi donner au lecteur un aperçu d’ensemble de la vie de Copernic, de ses activités et travaux dans d’autres domaines que l’astronomie, de la réception de son œuvre majeure jusqu’à sa condamnation au début du XVIIe siècle, etc.
L’exemplarité de Copernic
La révolution copernicienne aura des conséquences fondamentales et durables sur l’idée que l’homme se fait de sa place dans l’univers.
Après Copernic qui postule que l’homme, entraîné par la planète Terre autour du Soleil, n’occupe plus le centre du monde (qui reste unique chez lui), Giordano Bruno défend philosophiquement la thèse inouïe d’un univers infini abritant une infinité de mondes, eux-mêmes peuplés comme l’est la Terre. L’homme n’est donc plus seul. Quelle révolution !
Et puis, la voie était tracée pour Kepler, Newton, Laplace, et tous les autres qui ont fait progresser jusqu’à aujourd’hui notre conception de l’univers.
Il a fallu beaucoup d’obstination et de courage au chanoine Nicolas Copernic pour présenter et défendre la théorie héliocentrique. Car elle s’opposait à la vision du monde dominante ancrée dans la philosophie d’Aristote et l’astronomie de Ptolémée, et semblait aussi contredire une vérité tenue pour révélée par la majorité de théologiens, tant catholiques que réformés: à savoir que Dieu avait créé la Terre immobile au centre de l’univers. Une Terre faite par Dieu pour l’homme, et qui se trouverait, dans le système héliocentrique, délogée du lieu qu’Il lui avait assigné: voilà ce que Copernic avait eu l’audace de mettre en doute en publiant une doctrine fausse philosophiquement et contraire aux saintes Ecritures!
Cinq siècles environ après la parution du De revolutionibus, ce travail d’édition est l’occasion de rappeler l’importance de l’héritage intellectuel légué par Copernic, source d’inspiration pour tous les chercheurs qui luttent au quotidien avec courage contre le scepticisme et les idées reçues pour faire triompher la vérité scientifique…