Une équipe de l’Observatoire de Paris a observé des variations du flux intra-rouge thermique du système Pluton-Charon. Ceci prouve que la surface de Pluton n’est pas isotherme. On peut en déduire l’inertie thermique du sol de Pluton et des indications sur sa nature physique.
Pluton et Charon constituent un système bien particulier dans le Système Solaire. De tailles peu différentes, ces corps orbitent autour de leur centre de gravité commun avec une période de 6,4 jours. C’est également la période de rotation de chacun des deux corps sur lui même, chacun présentant de ce fait toujours la même face à l’autre. Des observations effectuées avec ISOPHOT par une équipe conduite par Emmanuel Lellouch (DESPA, Observatoire de Paris) ont permis de détecter pour la première fois sans ambiguïté la "courbe de lumière" du système Pluton-Charon aux longueurs d’onde thermiques. Il s’agit en réalité d’une "courbe de température" : à certaines positions orbitales le système émet plus de flux thermique qu’à d’autres, ce qui implique que les régions alors vues depuis la Terre sont plus chaudes.

On sait depuis longtemps que la surface de Pluton n’est pas uniforme. En particulier, la lumière solaire (domaine du visible) renvoyée par Pluton varie avec la période de 6,4 jours. Ainsi la magnitude visible de Pluton varie avec sa position sur son orbite (repérée par une longitude variant de 0 à 360 degrés). L’objet émet un maximum de lumière vers la longitude L=220 et un minimum vers L=100. Les mesures effectuées par la caméra ISOPHOT, installée sur le satellite ISO, montrent au contraire un maximum de flux thermique pour le système Pluton-Charon vers L=80 et un minimum vers L=240 (Figure 2). Cette anticorrélation générale avec la courbe de lumière visible est normale : on s’attend à ce que les régions sombres de Pluton soient plus chaudes que les régions claires. En effet les régions plus sombres absorbent davantage l’énergie solaire, elles s’échauffent plus et par conséquent émettent un flux infra-rouge plus important. Les régions les plus froides ont une température de 35-40 K, alors que la température des régions les plus chaudes peut atteindre 55-65 K. L’étude détaillée des mesures ISO montre de plus que l’anticorrélation n’est pas parfaite, la courbe de lumière thermique étant légèrement décalée ("en retard") par rapport à la courbe de lumière visible. Ceci permet de mesurer l’inertie thermique du sol de Pluton et suggère que le matériau, constituant les régions sombres de la planète, est probablement poreux.

Les résultats détaillés de ces observations seront publiés dans la revue internationale Icarus. Le satellite ISO a été financé par l’Agence Spatiale Européenne. Le DESPA (UMR 8632) est partiellement financé par le CNRS.
Détails : Emmanuel.Lellouch chez obspm.fr
Contact presse : Martine.Mathieu chez obspm.fr