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L’astéroïde Vesta a-t-il un champ magnétique ?

1er avril 2006

Vesta, un des trois plus gros astéroïdes de la ceinture principale, pose aux scientifiques un problème depuis 30 ans : "Etant donné que sa surface basaltique est semblable à la surface lunaire, qui est très altérée, pourquoi celle de Vesta ne l’est pas ?" Des astronomes de l’Observatoire de Paris (LESIA), de l’Observatoire de Catane et du laboratoire du CEREGE apportent pour la première fois une explication plausible à cette question en suggérant la présence d’un champ magnétique sur cet astéroïde !

Le vent solaire (ions et électrons) affecte les corps du système solaire qui ne sont pas protégés par une atmosphère ou une magnétosphère (par exemple la Lune ou les astéroïdes), et change les propriétés optiques de leur surface. Cette altération modifie les propriétés spectrales des objets riches en silicate, induisant un assombrissement et un rougissement progressif de leur spectre en réflectance dans le domaine de longueur d’onde 0.2-2.5 µm. La surface de Vesta, qui est un des trois plus grands astéroïdes de la ceinture principale (D = 529 ± 10 kilomètres), est étonnamment primitive. Des expériences récentes d’irradiation avec des ions sur des pyroxènes ont montré un rougissement et assombrissement significatif des spectres avec une irradiation progressive. Etant donné que le pyroxène est un composant majeur de la surface de Vesta, comme le démontre la spectroscopie, on pourrait s’attendre à ce que le vent solaire change de manière significative les propriétés optiques de la surface de Vesta. En conséquence, une expérience d’irradiation a été effectuée à l’Observatoire de Catane par une équipe de l’Observatoire de Paris animée par Pierre Vernazza sur une eucrite (météorite basaltique) appelée Bereba, qui caractérise bien la surface de Vesta, afin de simuler l’irradiation du vent solaire sur cet astéroïde.

L’irradiation d’un échantillon de Bereba (Figure1a), dont le spectre et l’albédo sont très proches de ceux de Vesta (albédo 0.35), transforme progressivement le spectre qui finit par être très semblable àcelui de la Lune, du point de vu de l’albédo ( 0.1) et de la pente spectrale. Il apparaît ainsi que l’altération spatiale affecte la surface de la Lune et non celle de Vesta. Le flux d’ions (ou fluence) de 6.6x1015 Ar++/cm2 atteint dans cette expérience correspond àune échelle de temps pour le vent solaire à2.36 UA (distance héliocentrique moyenne de Vesta) d’environ 105 ans. Cela montre qu’une durée très courte àl’échelle des phénomènes astronomiques suffit àmodifier les propriétés optiques de surface de cet astéroïde. Ce résultat implique que si les ions du vent solaire atteignent la surface de Vesta, son spectre devrait être plus rouge et son albédo plus bas. De fait, ceci implique que les particules du vent solaire ne peuvent avoir atteint la surface de l’astéroïde. Un champ magnétique rémanent est le processus le plus probable permettant de former un obstacle àl’écoulement du vent solaire en le déviant. Les données actuelles ne permettent pas de faire la distinction entre un champ magnétique global produisant une magnétosphère de type terrestre (Figure 2a) et plusieurs blocs de matière crustale uniformément magnétisés produisant des "magnétosphères" crustales (Figure 2b). L’irradiation d’un échantillon de Bereba (Figure1a), dont le spectre et l’albédo sont très proches de ceux de Vesta (albédo 0.35), transforme progressivement le spectre qui finit par être très semblable à celui de la Lune, du point de vu de l’albédo ( 0.1) et de la pente spectrale. Il apparaît ainsi que l’altération spatiale affecte la surface de la Lune et non celle de Vesta. Le flux d’ions (ou fluence) de 6.6x1015 Ar++/cm2 atteint dans cette expérience correspond à une échelle de temps pour le vent solaire à 2.36 UA (distance héliocentrique moyenne de Vesta) d’environ 105 ans. Cela montre qu’une durée très courte à l’échelle des phénomènes astronomiques suffit à modifier les propriétés optiques de surface de cet astéroïde. Ce résultat implique que si les ions du vent solaire atteignent la surface de Vesta, son spectre devrait être plus rouge et son albédo plus bas. De fait, ceci implique que les particules du vent solaire ne peuvent avoir atteint la surface de l’astéroïde. Un champ magnétique rémanent est le processus le plus probable permettant de former un obstacle à l’écoulement du vent solaire en le déviant. Les données actuelles ne permettent pas de faire la distinction entre un champ magnétique global produisant une magnétosphère de type terrestre (Figure 2a) et plusieurs blocs de matière crustale uniformément magnétisés produisant des "magnétosphères" crustales (Figure 2b).

Ce travail a permis de prédire la présence d’un champ magnétique sur Vesta, à partir de sa couleur observée depuis la Terre. Cette situation rappelle celle du champ magnétique de Jupiter, détecté depuis la Terre à partir des émissions radio, bien avant son exploration par une sonde spatiale.

Référence

  • Asteroid colors : a novel tool for magnetic field detection ? The case of Vesta P. Vernazza, R. Brunetto, G. Strazzulla, M. Fulchignoni, P. Rochette, N. Meyer-Vernet, I. Zouganelis A&A Letters, 2006, sous press.

Contact

  • Pierre Vernazza
    Observatoire de Paris, LESIA