En décembre 2020, s’est produite la "grande conjonction" entre Saturne et Jupiter, un phénomène rare où les planètes pouvaient être observées, dans un même champ du ciel, de façon très rapprochée. Cet événement astronomique a suscité l’intérêt des astronomes du monde entier et donné lieu à de multiples campagnes d’observation.
C’est dans ce contexte qu’une équipe scientifique internationale, dirigée par Oleg Smirnov, professeur au Rhodes Centre for Radio Astronomy Techniques & Technologies (RATT) en Afrique du Sud, et incluant notamment un astronome de l’Observatoire de Paris - PSL, a été amenée à pointer le radiotélescope MeerKAT de l’Observatoire de Radio Astronomie Sud-Africain (SARAO) vers la zone du ciel concernée.
Et là, surprise : dans le champ de vision, au voisinage de Saturne, une source radio complètement inattendue s’est soudainement activée, pendant environ 45 minutes, avant de s’éteindre à nouveau.
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De telles sources, dites "transitoires", sont très rares et donc scientifiquement intéressantes.
Au cours des mois qui suivirent, les scientifiques, intrigués, ont réutilisé MeerKAT à plusieurs reprises, parvenant ainsi à caractériser l’émission radio comme étant la signature d’un pulsar variable.
À ce stade des travaux, c’est une méthode développée à l’Observatoire de Paris – PSL qui a permis d’obtenir des informations cruciales sur le signal, en particulier sur son état de polarisation.
Un objet non répertorié jusqu’alors
Si les pulsars sont des objets bien connus et dénombrés par milliers, celui-ci se distingue par son comportement radio exceptionnel, présentant des amplificateurs de signal atteignant, en quelques minutes, jusqu’à 100 fois la luminosité habituellement enregistrée pour ce type d’objet.
Ce facteur égal ou supérieur à 10 lui a d’ailleurs valu d’endosser une nouvelle dénomination dans la nomenclature des pulsars. L’équipe scientifique l’a baptisé "PARROT", acronyme anglais pour "pulsar with anomalous refraction recurring on odd timescales", soit en français : "pulsar à réfraction anormale récurrente à des échelles de temps étranges”.
Les pulsars, et d’autres objets radio très compacts, présentent souvent des variations dues à la scintillation dans le vent solaire et le milieu interstellaire. Cette scintillation radio n’est d’ailleurs pas très différente du "scintillement" des étoiles lorsqu’elles sont observées en optique à travers l’atmosphère.
Mais aucun effet de scintillation ne peut rendre une étoile plus lumineuse d’un facteur dix au plus ! Ce phénomène d’amplification radio extrême, connue sous le nom de "lentille", sur d’aussi courtes périodes, est sans précédent.
Les mécanismes qui lui sont sous-jacents sont à ce jour inconnus. Ils pourraient s’expliquer par des structures inhabituelles dans le vent solaire ou encore par un plasma dense dans l’environnement du pulsar. Les pistes de recherche sont à l’étude.
De fait, la découverte du pulsar PARROT démontre tout le potentiel de MeerKAT à multiplier à l’avenir ce genre de découvertes de phénomènes transitoires et autres variables cosmiques. Sur ses nouvelles révélations à venir, la communauté scientifique fonde beaucoup d’espoirs et d’attentes.
Référence
Cette découverte est détaillée dans un article intitulé "The RATT PARROT : Serendipitous Discovery of a Peculiarly Scintillating Pulsar in MeerKAT Imaging Observations of the Great Saturn-Jupiter Conjunction of 2020", paru dans la revue MNRAS, le 21 février 2024.
https://doi.org/10.48550/arXiv.2312.12165
Dernière modification le 22 mars 2024