Depuis son atterrissage sur Mars en 2018, le sismomètre SEIS, réalisé sous la direction de l’IPGP, dans le cadre de la mission Insight de la NASA, fournit des informations inédites sur l’activité interne qui anime la planète rouge.

Mais afin que celles-ci puissent être complètes, il était capital de savoir déterminer l’orientation des secousses. Lors des préparatifs de cette mission, le problème de la détermination du Nord géographique martien s’était donc rapidement posé.
Deux solutions ont été retenues :
- La première avant l’atterrissage : elle consistait à utiliser le gyroscope d’InSight qui fonctionnait pendant la phase de descente de l’atterrisseur dans l’atmosphère de Mars, afin de poser la sonde dans la bonne direction. Mais une fois au sol, l’instrument cessait de fonctionner.
- La seconde, après l’atterrissage : il s’agissait d’utiliser une ombre projetée et de là, en déduire, avec une précision si possible inférieure à 5°, où se situait le Nord géographique, c’est-à-dire la direction de l’axe de rotation de la planète.
Dans cette seconde solution, on s’appuie sur le principe l’ombre portée d’un gnomon, autrement dit d’un bâton vertical planté sur un sol horizontal.
Une méthode millénaire
Cette méthode remonte aux astronomes babyloniens qui, il y a plus de 4000 ans, ont commencé à déterminer les premières constantes de l’astronomie. Ils ont dû remarquer très tôt que l’ombre d’un gnomon, infinie au lever du Soleil, se raccourcissait le matin pour être la plus courte possible à midi solaire lorsque le Soleil culminait : l’ombre indique alors soit le Nord soit le Sud selon le lieu où on se trouve. Puis l’ombre s’allonge l’après-midi et devient à nouveau infinie au coucher du Soleil.
Sur Mars, le même principe a été utilisé mais sans se limiter à l’instant de culmination du Soleil :
Connaissant les coordonnées géographiques martiennes du sismomètre et ayant mis au point une théorie qui donne la position du Soleil sur la planète en fonction de l’heure, on a pris une succession d’images de l’ombre au cours de la journée grâce à la camera située au bout du bras articulé.
Comme il n’était pas possible de munir SEIS, pour des raisons d’encombrement, d’un véritable gnomon, on a utilisé le crochet de préhension du sismomètre dont l’ombre circulaire se projetait sur une mire graduée, ce qui était loin d’être idéal en raison de la forme ovoïde de l’ombre.

Denis Savoie, grand spécialiste français de la gnomonique a eu la lourde tâche de piloter l’interprétation des clichés. Au final, une dizaine d’images ont été nécessaires pour déterminer où était situé le Nord géographique.
La confrontation avec l’orientation obtenue par les données du gyroscope a montré un écart voisin de ± 3°.
On peut considérer ce résultat comme excellent étant donné les difficultés d’estimer exactement la position de l’ombre.
Bibliographie
"Finding SEIS North on Mars : Comparisons Between SEIS Sundial, Inertial and Imaging Measurements and Consequences for Seismic Analysis" dans la revue Advancing Earth and Space Science