Lancée le 6 octobre 1990 par la navette américaine Discovery, Ulysse est une mission issue d’une collaboration étroite entre l’ESA et la NASA. Grâce à son orbite exceptionnelle hors du plan de l’écliptique (par effet de fronde gravitationnelle de Jupiter), Ulysse est la seule sonde à avoir étudié l’environnement spatial à toutes les latitudes héliographiques (80° Sud à 80° Nord) autour du Soleil. Ulysse a permis ainsi de cartographier l’héliosphère (la bulle de plasma soufflée par le vent solaire) en quatre dimensions pendant plus d’un cycle solaire. Ulysse a pour mission principale l’étude des propriétés du vent solaire, un plasma (gaz ionisé) composé principalement d’électrons et de protons, éjecté à une vitesse qui peut atteindre 800 km/s et davantage. Ce vent rapide, provenant des régions polaires du Soleil, n’était que très sporadiquement observé dans le plan de l’écliptique, et n’avait jamais été observé hors du plan. Ulysse a permis de montrer qu’il était présent tout au long du cycle solaire, et qu’en période de minimum d’activité solaire le vent rapide occupe la majeure partie de l’héliosphère.

Alors que son espérance de vie n’était que de 5 ans, Ulysse vit depuis 18 ans et a effectué 3 passages polaires autour de notre étoile : en 1994-1995 pendant le minimum d’activité solaire ; en 2001 pendant le maximum solaire ; depuis février 2007 il a entamé une dernière orbite à nouveau en minimum solaire. Tous les instruments à bord ont pu étudier les propriétés à grande échelle du vent solaire à treize ans d’intervalle, se produisant dans des conditions similaires, si ce n’est que les pôles magnétiques du Soleil se sont inversés : depuis 2001 le pôle nord magnétique se trouve au sud et vice-versa.

Ulysse a observé des changements inattendus du vent solaire rapide. Les observations proviennent de l’instrument radio embarqué URAP (Unified Radio And Plasma wave) à bord, permettant des mesures d’ondes à partir des antennes électriques connectées à un récepteur radio sensible, entièrement fabriqué à l’Observatoire de Paris. Ces observations permettent d’obtenir un diagnostic du vent solaire, en particulier de la densité électronique du plasma et de la température des électrons. Nous avons montré que le vent rapide des hautes latitudes solaires est aujourd’hui 20% moins dense et 13% plus froid qu’en 1994-95. Cette baisse notable est corroborée par des mesures complémentaires des particules, alors que le champ magnétique interplanétaire montre également une baisse d’intensité de plus de 35%. Ceci exclut donc tout effet instrumental dû à l’âge de la sonde. Le flux d’électrons normalisé à 1 UA montre une décroissance de 25 % alors que la vitesse du vent rapide est restée proche de sa valeur classique de 750 km/s.
Ce phénomène, actuellement incompris, pourrait être relié au cycle solaire de 22 ans ainsi qu’aux fluctuations de la dynamo solaire sur de longues périodes de temps. Une confrontation avec des observations solaires devrait permettre d’en savoir plus.

Référence
- Electron properties of high-speed solar wind from polar coronal holes obtained by Ulysses thermal noise spectroscopy : Not so dense, not so hot Issautier, K., Le Chat, G., Meyer-Vernet, N., Moncuquet, M., Hoang, S., MacDowall, R. J., McComas, D. J., Geophys. Res. Lett., Vol. 35, No. 19, L19101, doi:10.1029/2008GL034912, 2008
Contact
- Karine Issautier (Observatoire de Paris, LESIA et CNRS)