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Sonder le milieu interstellaire d’une galaxie très lointaine

23 mars 2023

Une équipe scientifique qui implique le GEPI à l’Observatoire de Paris - PSL a observé avec le spectrographe X-shooter de l’ESO/VLT l’un des sursauts de rayons gamma (GRB) les plus lointains jamais découverts. Cette étude a fait l’objet d’une publication dans Astronomy & Astrophysics, le 9 mars 2023.

L’un des principaux thèmes de l’astrophysique actuelle est l’étude des propriétés des galaxies dans le premier milliard d’années après le Big Bang. Le James Webb Telescope (JWST) fait d’énormes progrès dans cette direction. Cependant, le gaz neutre, qui est un ingrédient essentiel des galaxies à grand redshift (ou décalage vers le rouge) qui contient la majorité des métaux, reste insaisissable.

Le gaz neutre réside à la fois dans les galaxies, et autour des galaxies, dans le milieu circumgalactique (CGM).

Le moyen le plus efficace de définir les caractéristiques de ce gaz est d’utiliser les raies d’absorption détectées dans le spectre d’une source lumineuse de fond, telle que la rémanence d’un sursaut gamma de longue durée (LGRB pour Long Gamma-Ray Bursts). La spectroscopie optique et proche infrarouge des rémanences lumineuses des LGRBs dévoile la signature d’absorption du gaz le long de leur ligne de visée.

Zoom sur l’image HST profonde obtenue 250 jours après le déclenchement du GRB.
La croix violette indique la position de la rémanence du GRB, qui coïncide avec un objet qui est la galaxie hôte du GRB. Les lettres grecques désignent les quatre objets proches de la position de la rémanence qui peuvent faire partie de la galaxie hôte du GRB ou de galaxies proches ou en interaction.
Adapté de la Fig. 2 de Saccardi et al. 2023

Dans cet article, une équipe scientifique qui implique le laboratoire GEPI de l’Observatoire de Paris - PSL, a observé avec le spectrographe X-shooter de l’ESO/VLT l’un des GRBs les plus lointains jamais découverts : GRB210905A à un redshift z=6,3.

Une analyse détaillée du spectre d’absorption optique/NIR de la rémanence a été effectuée. L’équipe a détecté de l’hydrogène neutre ainsi que d’autres éléments légers/lourds tels que le carbone, l’oxygène, le magnésium, l’aluminium, le silicium et le fer. L’équipe a ainsi pu déterminer la métallicité, l’appauvrissement en poussières, la cinématique et l’abondance chimique de la galaxie hôte du GRB, en trouvant des indications de nucléosynthèse due à des étoiles massives. L’équipe a eu la chance exceptionnelle de sonder le gaz neutre d’une galaxie à haut redshift, alors que l’Univers n’avait que 0,9 Gyr.

Les résultats montrent le puissant potentiel des GRBs pour accéder à des informations détaillées sur les propriétés des galaxies à grand z, indépendamment de la luminosité de la galaxie.

Des observations photométriques et spectroscopiques profondes avec ESO/VLT/MUSE, HST et JWST offriront la possibilité unique de combiner les propriétés du gaz neutre avec celles du gaz ionisé d’une galaxie à z>6.

Sélection de quelques raies d’absorption (carbone, silicium et fer) du gaz de la galaxie hôte du GRB
Sélection de quelques raies d’absorption (carbone, silicium et fer) du gaz de la galaxie hôte du GRB détectées dans le spectre de rémanence optique et NIR du VLT/X-shooter obtenu 2,53 heures après le déclenchement du GRB. Les données sont en bleu, l’ajustement est en cyan, le spectre d’erreur est en orange, et les lignes verticales vertes en pointillés indiquent le centre des composantes.
Adapté de la Fig.1 dans Saccardi et al. 2023

À l’avenir, ce type d’études sera également réalisé avec les GRBs qui seront détectés par la mission sino-française SVOM prévue pour fin 2023.