
Afin de pouvoir conduire de telles observations, le premier des outils est un télescope de taille extrêmement grande. C’est le projet de télescope extrêmement grand européen (E-ELT de l’European Southern Observatory (ESO)) dont le miroir primaire fait 42 mètres de diamètre. Ce télescope installé au sol sera soumis aux effets inévitables de la turbulence atmosphérique terrestre, qui brouille les images et en détruit le contraste et la résolution. Pour lui permettre d’exprimer l’extrême finesse de qualité d’image dont il est capable, il devra être équipé de la technologie de l’optique adaptative. Il s’agit d’utiliser un miroir déformable pour compenser en temps réel les avances et les retards subis par les fronts d’onde de la lumière après propagation dans l’atmosphère. Jusqu’ici l’optique adaptative ne pouvait efficacement corriger la turbulence que sur un champ de vue étroit. Mais pour une analyse approfondie de l’univers jeune, il est nécessaire de corriger des champs de vue dix fois plus larges. C’est l’objectif de l’instrument EAGLE qui est en cours de définition en France et au Royaume-Uni et qui devrait permettre l’observation parallèle de 20 galaxies lointaines dans un champ de 5 minutes d’arc, chacune devant être corrigée des perturbations atmosphériques. Cependant, les galaxies primordiales sont trop faiblement lumineuses pour permettre une quelconque mesure de ces perturbations. Celle-ci devra alors s’appuyer sur l’information lumineuse des rares étoiles guides présentes dans le champ de vue, complétée par la création d’étoiles artificielles par laser quand le nombre d’étoiles guides naturelles disponibles n’est pas suffisant. Par ailleurs, la compensation de la turbulence par un seul miroir déformable n’est plus aussi efficace qu’en optique adaptative classique, à cause de la très grande taille du champ de vue. Cependant, du fait de la petite taille des galaxies primordiales (de l’ordre d’une seconde d’arc), il n’est en fait nécessaire de corriger que des petits îlots correspondant aux galaxies à observer qui sont par contre distribuées aléatoirement à travers le grand champ. La nouvelle technologie, appelée optique adaptative multi - objet (en anglais Multi-Object Adaptive Optics : MOAO), utilise donc un miroir déformable par galaxie-cible. Tous les miroirs déformables (20 pour EAGLE) sont alors commandés en boucle ouverte à partir des mesures faites sur toutes les étoiles guides du champ, par le biais d’un sondage tomographique de l’atmosphère. Cette nouvelle technologie vient d’être démontrée sur le ciel pour la première fois au monde par des membres de l’équipe EAGLE au télescope William Herschel de 4,2 mètres de diamètre à La Palma aux îles Canaries en Espagne. Le démonstrateur s’appelle CANARY. Les performances de CANARY sont à la hauteur des espérances placées dans la MOAO. La figure 1 présente les images d’une étoile de test sans la correction (montrant l’effet de la turbulence) et avec la correction par MOAO. La qualité obtenue de l’image est très proche de celle mesurée en mode optique adaptative classique dans les mêmes conditions. Dans CANARY, les corrections sont appliquées 150 fois par seconde en utilisant les mesures de trois étoiles guides naturelles hors axe à grande distance de l’étoile de tests sur axe. Par un algorithme original de tomographie, le système est capable de calculer la correction à appliquer en boucle ouverte au miroir déformable sur axe à partir des mesures hors axe. La tomographie et la commande en boucle ouverte représentent deux avancées majeures en optique adaptative. La prochaine étape sera de répéter l’expérience mais avec des étoiles guides artificielles créées par laser.

Voir le site de l’INSU-CNRS Les laboratoires impliqués dans le développement et la première démonstration de CANARY : - Laboratoire d’Etudes Spatiales et d’Instrumentations en Astrophysique (LESIA) (Observatoire de Paris, CNRS, UPMC et Université Paris Diderot), France - Laboratoire d’Etudes des Galaxies, Etoiles, Physique et Instrumentation (GEPI) (Observatoire de Paris, CNRS et Université Paris Diderot), France - Durham University, Royaume-Uni - Astronomy Technology Centre (UKATC), Royaume-Uni Pr. Gérard Rousset (LESIA) et Dr. Richard Myers (Durham University) sont les responsables du projet CANARY. L’équipe CANARY remercie les contributions de Engineering and Project Solutions Ltd et de Isaac Newton Group qui gère le télescope William Herschel. Les laboratoires impliqués dans le développement de l’instrument EAGLE : - Laboratoire d’Astrophysique de Marseille (LAM) (CNRS, Université de Provence), France - LESIA - GEPI - Office National d’Etudes et de Recherches Aéropsatiales (ONERA), France - UKATC - Durham University Le projet EAGLE est mené par Dr. Jean-Gabriel Cuby (LAM) et Pr. Simon Morris (Durham University). Pour les prochaines étapes de démonstration de CANARY (avec étoiles lasers), tous les membres du consortium EAGLE seront impliqués. Les financements de CANARY : - Agence Nationale de la Recherche (ANR) programme 06-BLAN-0191, - Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) - Institut National des Sciences de l’Univers (INSU), - Observatoire de Paris, - et Université Paris Diderot - Paris 7, en France ; - Science and Technology Facilities Council - et Durham University au Royaume-Uni ; - Commission Européenne (Framework Programme 7) avec : E-ELT Preparation, Infrastructures 2007-1 Grant 211257 et OPTICON Infrastructures 2008-1 Grant 226604. Contact Gerard Rousset (Observatoire de Paris, LESIA et CNRS) Eric Gendron (Observatoire de Paris, LESIA et CNRS)