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Détection de nuages de gaz lointains contenant des traces des premières étoiles

Communiqué de presse | Observatoire de Paris - PSL, CNRS

Dans le cadre d’une collaboration internationale, un chercheur de l’Observatoire de Paris – PSL au GEPI (Observatoire de Paris – PSL/CNRS) découvre que des nuages de gaz lointains contiennent les traces des premières étoiles de l’Univers. Ces travaux menés grâce à l’analyse de données d’archives issues du Very Large Telescope de l’ESO, paraissent dans la revue Astrophysical Journal, le 3 mai 2023.

Lorsque les premières étoiles sont apparues, il y a plus de 13,5 milliards d’années, l’Univers n’était constitué que des éléments chimiques les plus simples de la nature : l’hydrogène et l’hélium. Les éléments qui constituent notre propre corps, tels que le carbone, l’oxygène et le fer, ont d’abord été synthétisés à l’intérieur des premières étoiles, puis libérés dans le gaz environnant par les premières explosions de supernovae survenant à la mort d’étoiles massives.

La nature des étoiles primordiales est encore inconnue. Cependant, ces étoiles peuvent être étudiées indirectement grâce à la détection des éléments chimiques qu’elles ont dispersés dans l’environnement, après leur mort, et qui sont encore présents dans le gaz diffus ou bien qui ont été incorporés par les générations suivantes d’étoiles dites "normales".

Éléments chimiques dans un nuage de gaz lointain
Vue d’artiste représentant un nuage de gaz lointain contenant différents éléments chimiques, illustrés ici par des représentations schématiques de divers atomes.
Grâce au Very Large Telescope de l’ESO, des astronomes ont détecté trois nuages de gaz lointains dont la composition chimique correspond à ce que nous attendons des explosions des premières étoiles apparues dans l’Univers. Ces premières étoiles peuvent être étudiées indirectement en analysant les éléments chimiques qu’elles ont dispersés dans le milieu environnant après leur mort dans l’explosion d’une supernova. Les trois nuages de gaz lointains détectés dans cette étude sont riches en carbone, en oxygène et en magnésium, mais pauvres en fer. C’est exactement la signature attendue des explosions des premières étoiles.
ESO/L. Calçada, M. Kornmesser

L’étude parue dans la revue Astrophysical Journal du 3 mai 2023 s’est basée sur l’analyse de données d’archives issues d’un échantillon de 100 spectres de quasars à grand décalage spectral obtenus avec le spectrographe X-shooter, installé sur le Very Large Telescope de l’ESO. Elle rapporte pour la première fois la détection de trois nuages de gaz lointains pourvus d’une composition chimique correspondant à ce qui est attendu des premières explosions stellaires.

Mesure de la composition chimique d’un nuage de gaz
Ce diagramme illustre comment les astronomes peuvent analyser la composition chimique de nuages de gaz lointains en utilisant la lumière d’un objet de fond, tel qu’un quasar comme balise.
Lorsque la lumière du quasar traverse le nuage de gaz, les éléments chimiques qu’il contient absorbent différentes couleurs ou longueurs d’onde, laissant des lignes sombres dans le spectre du quasar. Chaque élément laisse un ensemble différent de raies. En étudiant le spectre, les astronomes peuvent donc déterminer la composition chimique du nuage de gaz intermédiaire.
ESO/L. Calçada

« Pour la première fois, nous avons pu identifier les traces chimiques des explosions des premières étoiles dans des nuages de gaz très lointains, observés lorsque l’Univers n’était qu’à 10-15% de sa taille », explique Andrea Saccardi, doctorant à l’Observatoire de Paris - PSL, qui a mené cette étude dans le cadre de sa thèse de master à l’Université de Florence.

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Lire aussi l’information
sur le site de l’Observatoire européen austral (ESO) [en anglais] :
"Astronomers find distant gas clouds with leftovers of the first stars"

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Ces nuages ont une très faible teneur en fer, mais présentent une surabondance de carbone et d’autres éléments légers. Cette composition chimique particulière a également été observée dans de nombreuses vieilles étoiles de notre galaxie, que les chercheurs considèrent comme des étoiles de deuxième génération qui se sont formées directement à partir des "cendres" des premières.

En quoi ce résultat est-il important ?

Nous savons que les étoiles se forment à partir du gaz. Il existe donc dans l’Univers lointain (et primitif) des nuages de gaz présentant la même composition chimique que les étoiles de deuxième génération contenues dans notre Galaxie. Ces travaux ont ainsi permis de les identifier et de comprendre quels types de nuages de gaz doivent être analysés pour dévoiler la signature chimique des premières supernovae.

Cette découverte ouvre de nouvelles voies pour étudier indirectement la nature des premières étoiles, complétant pleinement les études d’archéologie stellaire des anciennes étoiles situées dans notre Galaxie.

Référence

L’article est publié sous le titre : “Evidence of first stars-enriched gas in high-redshift absorbers” par Andrea Saccardi and all, dans la revue Astrophysical Journal en date du 3 mai 2023.
DOI : 10.3847/1538-4357/acc39f